Helodium blandowii (F.Weber & D.Mohr) Eckel
Nouvelles localités : 14 juillet 2014, Haute-Loire, Chaudeyrolles, Les Narces, 1230 m
Helodium blandowii est considérée comme une relique glaciaire (Herzog 1926, Dickson 1973, Eland & Wiegers 1984, Ochyra et al. 1988) et présente un grand intérêt phytogéographique. Il s’agit d’une espèce observée à l’état fossile ou subfossile dans une grande partie de l’Europe (Dickson 1973). C’est une espèce circumpolaire, pénétrant dans l’arctique mais qui n’atteint cependant pas 70 °N. C’est une espèce boréo-subarctique (Ochyra et al. 1988) en Europe, relativement bien représentée dans le nord de mais extrêmement rare, et en grande raréfaction, plus au sud. En Europe centrale, elle est en voie de disparition, si ce n’est déjà disparue, presque partout. Elle a récemment été découverte dans les Pyrénées-Orientales, en Cerdagne, de sorte que sa découverte dans le Massif central n’est pas vraiment surprenante. En revanche, les données des Alpes françaises se sont révélées inexactes. La localité auvergnate n’est pas tout à fait isolée puisqu’une petite population a également été découverte du côté ardéchois, dans des conditions écologiques comparables. C’est une espèce nouvelle pour la France.
Les Narces de Chadeyrolles correspondent à un cratère de maar résultant d’une éruption phréatomagmatique. Le substrat géologique est essentiellement constitué de laves trachy-andésitiques et de basanites. Cette vaste zone humide surtout colonisé par des bas-marais variés a subi d’importantes modifications liées à l’exploitation agricole du site. Le pâturage et l’extraction de tourbe sont les deux activités ayant eu des impacts très significatifs sur la morphologie et la dynamique du site.
Dans les anciennes dépressions issues de creusements anciens, on trouve des marais de transition à Carex rostrata et C. lasiocarpa accompagnés de Aulacomnium palustre, Bryum pseudotriquetrum et Calliergon giganteum. Les autres bas-marais sont plutôt dominés par Carex curta, C. nigra, C. panicea et C. appropinquata. Les bryophytes les plus fréquentes et les plus abondantes dans ce type de végétation sont Sphagnum angustifolium, S. teres, S. warnstorfii, Climacium dendroides et Aulacomnium palustre. Les compagnes les plus fréquentes de Helodium sont Carex curta, C. nigra, C. appropinquata, Succisa pratensis et Sphagnum teres, Climacium dendroides, Calliergonella cuspidata, Aulacomnium palustre, Tomentypnum nitens, Plagiomnium elatum. Helodium blandowii affectionne tout particulièrement des communautés relativement fermées, correspondant pratiquement à des ourlets hygrophiles sous-pâturés. La surface occupée par Helodium blandowii dans l’ensemble du site est proche de 9 m². Des sporophytes sont produits abondamment.
La présence de sporophytes combinée à l’existence de cette population à proximité de fosses d’extraction de la tourbe témoigne d’un certain dynamisme actuel. Toutefois, au vu de l’importance des surfaces aujourd’hui couvertes par des habitats potentiels sur les grands plateaux auvergnats et de la rareté de l’espèce, une origine relictuelle ne peut être exclue. L’origine des populations du Massif central est relativement obscure et mériterait de faire l’objet de travaux plus approfondis, avec l’aide de l’outil moléculaire.
La conservation de l’espèce passe par une cartographie détaillée des touffes existantes, de leur suivi et de la mise en place de mesures de surveillance des effets du pâturage et de l’hydologie du site sur les populations. Des actions visant à minimiser le chargement pourraient être envisagées rapidement à la lumière des résultats obtenus.
Vincent HUGONNOT & Jaoua CELLE