Tetraplodon angustatus (Hedw.) Bruch & Schimp.
Nouvelle localité : 5 août 2014, Haute-Loire, Freycenet-la-Cuche, forêt domaniale du Mézenc, Roche du Bachat, 1360 m
Tetraplodon angustatus est une espèce boréo-montagnarde présentant une distribution circumpolaire dans l’Holarctique. Elle est connue dans la partie septentrionale de l’Amérique du Nord, au Groenland, en Asie et en Europe, où c’est principalement une espèce des Scandes. En Europe centrale, elle est recensée dans les Alpes, les Sudètes et les Carpathes (Szmajda et al., 1991). Les localités des « hautes-terres » d’Ecosse, du centre de l’Irlande et du nord du pays de Galle sont les plus à l’ouest (Rothero in Blockeel et al., 2014). Tetraplodon angustatus n’est ni recensé dans les Pyrénées ni dans les montagnes de la péninsule ibérique. La population du Massif du Mézenc, en Haute-Loire est donc très isolée puisqu’elle constitue la limite sud-ouest de l’aire de l’espèce en Europe.
Le genre Tetraplodon est représenté par deux espèces en France, T. angustatus et T. mnioides. Tetraplodon mnioides n’est connu avec certitude que dans le Jura, où il a été observé récemment, sur des crottes de renard (Philippe, 2013). Tetraplodon angustatus était déjà connu en France, de deux mentions, dont une très ancienne, dans le massif du Mont Blanc (Husnot, 1892-1894; Vadam, 1976). L’espèce est plus répandue en Suisse dans les massifs montagneux.
Tetraplodon angustatus a été observé dans un pierrier phonolithique constitué de blocs de grande taille, à peu près dépourvu de végétation trachéophytique. La flore de cet ébouli est essentiellement faite d’un assemblage de Gymnomitrion concinnatum, Marsupella funckii et Racomitrium sudeticum, typique des éboulis siliceux subalpins. Les touffes de Tetraplodon colonisaient des fèces de renard laissées comme marquages sur le sommet de gros blocs métriques. Cinq touffes, correspondant à cinq crottes, ont été observées. Aucune bryophyte n’a été observée en compagnie du Tetraplodon. Tetraplodon angustatus est réputé coloniser des cadavres, des excréments, des pelotes de réjection (Cykowska-Marzencka, 2013) dans des éboulis, ou plus rarement, dans des hauts-marais (Stebel et al., 2004).
Les renards sont considérés comme des espèces nuisibles et sont donc chassés tout au long de l’année partout en France. Les effectifs actuels des populations de renard sont donc sans doute très loin des potentialités offertes par le milieu naturel et cet état de fait constitue sans doute la principale limite à l’expansion de Tetraplodon angustatus en Auvergne.
Vincent HUGONNOT & Jaoua CELLE