Liste rouge des végétations menacées en Auvergne-Rhône-Alpes
Dans le langage des botanistes, une « végétation » désigne une communauté de végétaux vivant dans un contexte écologique particulier. Selon ce principe, en tout lieu de France, à conditions écologiques égales (sol, relief, climat…), une végétation héberge une combinaison identique de plantes (diversité, abondance). Et par conséquent, chaque variation des conditions écologiques entraîne l’apparition d’une végétation adaptée à ce contexte et donc différente des autres. De fait, la végétation d’une forêt est très différente de celle d’une prairie, tout comme celle des forêts montagnardes des versants ouest du Puy Mary, sera très différente de celle des forêts bordant la Loire. Depuis 1915, la phytosociologie étudie la composition, la répartition et le fonctionnement de ces « communautés végétales » recensées en tous points du globe. À travers cette discipline, les végétations ainsi décrites sont nommées en latin à partir du nom d’une ou de deux espèces de plantes qui les caractérisent (et auquel un suffixe est ajouté pour faciliter leur classement dans un système hiérarchisé).
En Auvergne-Rhône-Alpes, les phytosociologues des Conservatoires botaniques nationaux alpin et du Massif central ont recensé plus de 1 345 types de végétations (plus exactement d’associations végétales). À partir de ces éléments de connaissance, grâce aux soutiens de l’État et de la Région Auvergne-Rhône-Alpes, les deux conservatoires botaniques ont établi une « Liste rouge régionale des végétations menacées », permettant pour chaque végétation d’évaluer sa menace d’extinction locale, d’une manière similaire au travail conduit sur les espèces animales et végétales par l’Union internationale de conservation de la nature (UICN).
Cette analyse s’appuie sur l’étude rigoureuse de la répartition et de la rareté régionales de chaque végétation mais aussi des impacts déjà subis par celles-ci au cours des dernières années. Néanmoins, 10 % des végétations analysées ne bénéficient pas d’un niveau de connaissances suffisant pour pouvoir statuer sur leur sort.
À la lecture des résultats, on apprend ainsi que les menaces les plus fortes pèsent sur les végétations des milieux humides (grèves humides et mares temporaires, herbiers aquatiques, mégaphorbiaies et prairies de hautes herbes, les tourbières, gouilles et bas-marais), mais aussi sur celles des milieux prairiaux pauvres à moyennement enrichis en éléments nutritifs (pelouses et prairies sèches, pelouses maigres collinéennes et montagnardes, prairies humides et semi-humides). On observe également une certaine inégalité territoriale à l’instar des milieux subalpins, d’un côté communs et peu menacés dans les Alpes et, de l’autre, très rares et fortement menacés sur les montagnes du Massif central.
Certains groupes de végétation ont subi un lourd tribu, quels que soient le territoire et les différentes végétations qui les caractérisent. C’est ainsi le cas des prairies de fauche des bassins sédimentaires d’Auvergne telles que la Prairie humide fauchée à Fromental et Filipendule commune (Arrhenathero elatioris-Filipenduletum vulgaris) qui ont subi une forte régression en lien avec l’évolution des pratiques agricoles en fond de vallée.
Comme pour les espèces animales et végétales, de nombreuses végétations rares et remarquables sont aujourd’hui menacées tandis qu’elles ne bénéficient d’aucune protection particulière. Les végétations des prairies humides (Bromion racemosi) ou encore celles des fourrés subalpins des secteurs longuement enneigés (Pruno petraeae-Sorbion aucupariae) subissent, par exemple, le calibrage des cours d’eau, la mise en culture des prairies alluviales, ou encore les effets du dérèglement climatique. D’autres végétations affichent aucun statut de menace à l’échelon régional, dans sa globalité, tandis qu’elles s’avèrent réellement menacées d’extinction sur une partie du territoire (notamment sur l’un ou l’autre des massifs montagneux).
Répartition en pourcentages des statuts de menace par groupe de végétation
Comme toutes les autres listes rouges (régionales, nationales, internationales), ces documents permettent aux pouvoirs publics de bénéficier d’une hiérarchisation des priorités d’actions en faveur de la conservation des végétations et des habitats naturels. Elles permettent à la fois d’alerter les établissements chargés d’instruire un dossier soumis à la règlementation relative à la biodiversité (alerte sur la présence d’éléments rares et menacés) tout comme elles peuvent permettre de cibler les moyens humains, techniques et financiers sur les éléments les plus précieux de notre patrimoine.
Cette liste est disponible, ci-dessous en bas de page, et parmi notre palette d’outils pratiques.