Effets du réchauffement climatique
Des effets du réchauffement climatique sur la diversité végétale et fongique et les activités humaines qui en dépendent, mieux connus et anticipés
Si l’augmentation moyenne des températures est observée partout dans le Monde, elle semble particulièrement plus élevée en France, et le Massif central n’est pas en reste. À Clermont-Ferrand et Lyon, par exemple, entre 1961 et 2023, les températures moyennes ont augmenté de près de 3°C tandis que les précipitations et l’enneigement ont diminué. Les derniers épisodes de sécheresse quasi-récurrents (2018, 2019, 2020, 2022, 2023…) ont fortement impacté les végétations prairiales et forestières du territoire parfois déjà fragilisées par certaines pratiques agricoles ou sylvicoles intensives.
À basse et moyenne altitudes, les plantations d’essences
montagnardes, les très jeunes plantations forestières après coupes rases ou
encore les prairies temporaires installées sur des sols maigres mais aussi
certaines zones humides (tourbières, mares temporaires, gazons amphibies…) ont
montré leur fragilité face aux épisodes de sécheresse et la difficulté de
reprise pour la flore et la fonge lorsque ceux-ci sont récurrents. Mais au-delà
des végétations exploitées, c’est tout un pan de la diversité végétale et
fongique sauvage, située en contexte naturel, qui montre de sérieux signes de
faiblesse : raréfaction des parties aériennes des champignons eumycètes
assurant leur reproduction, épidémie d’embolie gazeuse chez les arbres,
malformation des semences chez les plantes à fleurs, colonisation de nouvelles
espèces aux hautes altitudes, migration d’espèces thermophiles, parfois
exotiques et envahissantes… Si la biodiversité a toujours su s’adapter aux
grands bouleversements de la planète (glaciation, réchauffement), la vitesse du
phénomène actuel est sans précédent et ne peut qu’inquiéter sur le sort réservé
aux espèces de notre ère.
Aux plus hautes altitudes du Massif central, la hausse des températures moyennes, les sécheresses printanière et estivale accrues du fait de l'augmentation de l'évapotranspiration, la hausse des phénomènes météorologiques rares, la modification de la répartition des précipitations dans l'année, la diminution du nombre de jours de gel et l’augmentation de la précocité de la fonte des neiges compromettent le maintien des végétations subalpines voire celui d’espèces artico-alpines uniques en France. Selon nos dernières études, si les espèces ne peuvent s'adapter physiologiquement ou se déplacer, elles semblent être remplacées par des espèces plus thermophiles et moins spécialisées, jusqu’alors situées à plus basse altitude.
Face à ces évolutions, des acteurs économiques et des pouvoirs publics réagissent, parfois en faveur d’actions à court terme qui visent à atténuer les impacts sans participer à lutter contre les phénomènes à leur origine. D’autres réfléchissent à une nouvelle façon d’exploiter les ressources naturelles, de manière plus durable et moins impactante. Dans les deux cas, l’apport d’informations scientifiques fiables sur l’évolution positive ou négative de la flore est indispensable pour nourrir et accompagner ces acteurs vers une transition écologique efficace.
Nos suivis de végétation et nos études tendent à démontrer une plus grande résilience au sein des milieux fortement biodiversifiés. En contexte agricole, les prairies et pelouses naturelles, bien qu’ayant subi une très forte altération du tapis herbacé en fin de période de sécheresse comme tous les autres milieux herbacés, ont montré une très grande capacité de renouvellement dès les premières précipitations notamment chez certaines plantes à fleurs. En forêt, la compensation de la perte de sapins ou de pins par la régénération naturelle ou le remplacement par d’autres essences autochtones semblent se mettre en place sur un pas de temps plus long tandis que la dynamique forestière demeure conservée. Le maintien à court terme d’une flore diversifiée dans les exploitations agricoles et forestières, ancré dans les cahiers des charges des filières de production, paraît constituer un facteur déterminant de résilience et de robustesse.
Plus globalement, les dynamiques climatiques et végétales observées sont totalement inédites et il est encore difficile pour le CBN Massif central d’en deviner les conséquences et de conseiller les gestionnaires d’espaces sur les adaptations nécessaires de certaines pratiques agricoles ou sylvicoles face au dérèglement climatique. À cet égard, la mobilisation des acteurs de la recherche et des données régulièrement acquises par le CBN Massif central constitue un enjeu fort auquel devra répondre le CBN s’il veut anticiper l’évolution des différentes composantes de la diversité végétale et fongique sur le moyen terme voire en protéger les éléments les plus remarquables. La mise en place de suivis fins d’évolution de la flore, de la bryoflore et de la fonge sauvages dans les milieux prairiaux, forestiers et humides est une condition indispensable à l’anticipation des impacts du réchauffement climatique sur la biodiversité, la fonctionnalité des écosystèmes et l’intégrité des ressources exploitées (eau, bois, herbe…) par le territoire.